AccueilActualitésLe maître et son élève
Durant Arte Flamenco, l’immense Rafael Riqueni a dispensé une Master class de guitare… à un unique stagiaire. Un cours très particulier et riche en émotions.
Imaginez : vous êtes un passionné de tennis et on vous donne l’occasion de vous entrainer en tête-à-tête durant cinq jours avec Roger Federer. Une opportunité proprement extraordinaire, qui suscite autant d’excitation que d’appréhension. C’est ce mélange de sentiments qui a saisi Hadrien Gouze, guitariste amateur originaire de Dordogne, lorsqu’il a découvert qu’il serait le seul élève de la Master class de Rafael Riqueni durant Arte Flamenco. « Depuis plus de 20 ans, je suis fan de ce musicien. J’ai écouté tous ses disques. Forcément, me retrouver seul avec lui était extrêmement impressionnant ».
Le terme si galvaudé de génie pour définir l’aura de Rafael Riqueni dans le mundillo de la guitare flamenca ne paraît pas exagéré. Mieux, le Sévillan est considéré comme un des plus grands concertistes de cet instrument, tous styles confondus. Fuyant le clinquant de la virtuosité technique, le maestro force l’admiration par la subtilité, la sensibilité et l’harmonie de ses compositions, laissant voir une âme romantique, inquiète et délicate. Son dernier disque Herencia, sorti au printemps, est un hommage aux grands maîtres de la guitare soliste flamenca (Serranito, Manolo Sanlúcar, Paco de Lucia, etc.). Il y interprète 10 palos* et concilie dans chaque pièce sa maîtrise absolue de la tradition et son inimitable touche personnelle.
Difficile donc de ne pas être intimidé lorsqu’on se retrouve seul à jouer devant un tel monument. « Quand j’ai joué la première fois devant lui, témoigne Hadrien Gouze, il m’a dit : "ça, ça ne va pas ; là, je ne veux pas voir ce pouce ; le compás**, il faut le respecter, etc." Dès le deuxième jour, j’ai senti une amélioration du son, juste en l’imitant – de très loin – et en m’imprégnant de ses sonorités ». Ce que confirme avec bienveillance l’auteur de Parque de María Luisa : « J’ai constaté un progrès dans l’expression, la manière de placer la main ou de gratter la corde. J’ai pu noter de surprenants changements en à peine une semaine ».
Pendant les cinq jours du stage, maître et élève ont abordé quatre palos : la seguiriya, la soleá, la taranta et la granaína. Des souvenirs inoubliables, mais aussi des maux de crâne en perspective, pour le guitariste amateur : « j’ai des images en tête, je me suis bien imprégné du son, et je repars aussi avec énormément, énormément de travail devant moi. J’en ai pour quelques mois à encaisser tout ça ». Rafael Riqueni ne boude pas son plaisir : « Cette semaine avec mon élève a été remplie de sensations. Je suis très heureux qu’Hadrien ait dit à l’organisation du festival qu’il était ravi de son stage. De toute manière, j’ai encore énormément de choses à lui apprendre et j’ai largement de quoi animer de nouvelles classes pour l’édition de l’année prochaine ! »