AccueilActualitésAu fond des bois
Ebéniste d'art, Benoît Lafond crée toutes sortes de mobilier unique, objets décoratifs et pièces artistiques. Du sur-mesure en bois massif local.
Le GPS a perdu trace de la route au milieu de la forêt. Dans la dernière maison du village de Pouydesseaux, route de Sarbazan, vit Benoît Lafond. Là, un petit chat miaule, à part ça, le silence. Une dizaine de troncs nus géants amassés à l'entrée accueillent le visiteur. Ils finiront leur vie en beau bois de charpente pour des maisons landaises. Charpentier à ses heures en cheville avec la scierie de son père à Villeneuve, le trentenaire pourra aussi tailler dedans des colombages à l'ancienne pour rénover de vieilles demeures.
Benoît Lafond travaille avec une trentaine d'essences qui poussent par ici : chênes, frênes, acacias, peupliers « qu'on utilise pour des cageots alors qu'ils ont de beaux motifs décoratifs », et aussi cèdres ou tamaris récupérés dans les parcs et jardins ou auprès d'élagueurs. Ici rien ne se perd. En atteste la poubelle à déchets quasi vide dans la grange-atelier à la bonne odeur de bois.
Gouje, scie, rabot, mortaiseuse, coulage d'étain pour combler des trous... « Je cherche le défaut, les aspérités, j'aime garder les nœuds du bois pour l'esthétique, et rester dans des choses qui ne paraissent pas droites mais qui, en fait, sont millimétrées », dit celui qui a beaucoup appris auprès de Guy Bouchet, ébéniste d'art dans le Gers voisin. Un travail manuel, sensible, au plus près des courbes naturelles de l'écorce, comme sur sa dernière étagère atypique qu'il a livrée en Ariège pour une boutique de minéraux.
Travailler avec des règles géométriques précises sur des formes quelconques, c'est mon dada.
Benoît Lafond, ébéniste
Aujourd'hui « très souvent, les gens sont dans la consommation, ils veulent quelque chose de fini sur catalogue. Chez moi, la démarche est tout autre, il s'agit d'être les mains du client, en s'adaptant à un intérieur et à un budget, dans une certaine éthique ».
Membre du Conseil d'administration de l'UNAMA (Union nationale de l'artisanat et des métiers de l'ameublement), ce formateur en ressourceries-recycleries aime aussi mélanger les matières – bois, tissu, fer, étain, vitraux -, dans ses meubles ou œuvres d'art. Avec la tisserande Mélanie Morassin, il a réalisé deux sculptures qui ont décoré la scène des « Rencontre avec »* durant Arte Flamenco 2021 : « l’idée, c’était de retrouver la tendresse et la volupté de la musique dans les formes du bois et dans les couleurs des tissus. On voulait créer une espèce de relation entre les matières et la musique ». Pas sûr qu'il ait, cette année encore, le temps pour réaliser son vieux rêve : fabriquer une guitare de ses mains. Il a en tout cas déjà mis le bois de côté.
* Le rendez-vous quotidien de 11 h, ouvert au public, entre la presse et les artistes